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Parution - Numéro thématique RPSF - Perspectives comparées sur l'emploi et les services de care à domicile en temps de pandémie
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Du 26 mars 2024 au 30 juin 2024false false
Dossier coordonné par Virginie GuiraudonClémence Ledoux, Loreta Poblete - RPSF,, vol. 150, no. 1, 2024
Inédite et inattendue, la pandémie de Covid-19 a conduit les gouvernements du monde entier à prendre des mesures radicales aux conséquences massives (Béland et al., 2021 ; Bergeron et al., 2020 ; Vanercke et al., 2021). Alors que les pays du Nord ont mis en place des dispositifs de salaire de remplacement pour les employés en arrêt de travail et ont pu compter sur des systèmes de santé structurés, les pays du Sud ont plus rarement adopté de telles politiques et ont davantage dû s’appuyer sur des mesures de distanciation sociale afin de freiner la diffusion du virus (ibid.). Si beaucoup de politiques publiques ont pu être décidées par les gouvernements et les administrations centrales, d’autres organisations (partenaires sociaux, collectivités territoriales, organisations non gouvernementales, organisations prestataires, etc.), comprenant les employeurs de même que les travailleurs, les ont mises en œuvre à différents niveaux. À l’échelle individuelle, les politiques de lutte contre la pandémie ont souvent conduit à un repli dans les foyers, mais de façon différenciée selon les catégories sociales et les territoires concernés (Craig, 2020 ; Ramos et al., 2021 ; Collectif d’analyse des familles en confinement, 2021).
Au sein d’un même pays, les dispositions prises n’ont pas touché de la même façon les différents groupes sociaux et les secteurs d’activité. L’augmentation du nombre de malades a parfois permis de prendre conscience collectivement de l’importance des activités de care, pouvant être définies comme des tâches variées, liées à l’entretien des corps, au maintien de l’autonomie (Ibos et al., 2019 ; Ledoux et al., 2023) et, dans un sens très large, comme une « activité générique qui comprend tout ce que nous faisons pour maintenir, perpétrer et réparer notre “monde”, de sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible » (Tronto, 2009, p. 143). Divers travaux en sciences sociales ont en particulier souligné la transformation des activités de soin à autrui induites par la crise sanitaire et le rôle de celles et de ceux qui ont permis de maintenir la vie pendant cette période particulière (Bahn et al., 2020 ; Chatzidakis et al., 2020 ; Rubery et Tavora, 2020 ; Eurofound 2022).
Si les personnels de santé ont été applaudis dans nombre de pays, dans certains cas, les personnes travaillant dans le care ont également fait l’objet de l’attention du public, des médias, voire des gouvernements. Cependant, tous les segments des métiers du care n’ont pas été systématiquement considérés et traités de la même façon. Les travailleurs du care, en particulier à domicile, sont en très grande majorité des femmes et des pauvres (Avril et Cartier, 2014 ; Devetter et al., 2017 ; Pulignano, 2019 ; OECD, 2020 ; Eurofound, 2022 ; Eige, 2021). Parmi elles, les femmes issues de l’immigration ou membres de minorités ethnoraciales sont surreprésentées, en particulier dans les grandes métropoles (Kofman et al., 2000 ; Salazar et Parreñas, 2001 ; Falquet et al., 2010 ; Lutz, 2011 ; Marchetti, 2014 ; Avril, 2014). Leurs conditions de vie, de travail et d’emploi sont très différentes selon leur situation familiale, le cadre d’activité – en institution ou à domicile –, les bassins d’emploi et les pays concernés (Avril, 2014 ; Van Hooren et al., 2019). À domicile, les statuts diffèrent : emploi déclaré ou non déclaré ; emploi par les particuliers, par un prestataire ou autoentreprenariat ; prestataires publics, associatifs ou commerciaux ; live-in work (habitant chez la personne aidée) ou travail ponctuel (Ramos Martin et Belen Munoz Ruiz, 2020). Ces différents statuts peuvent également donner lieu à des formes de ségrégation selon les caractéristiques sociales et les capacités à se mobiliser des travailleuses et de leurs employeurs ou bénéficiaires, qui sont variables d’un segment professionnel à l’autre (Van Hooren, 2021 ; Apitzsch et Shire, 2021).
Avec la pandémie de Covid-19, les questions que se sont posés les divers actrices et acteurs concernés ont été les mêmes : comment assurer la protection de la santé des travailleuses du care et des personnes dont elles s’occupent ? (…)
Au sein d’un même pays, les dispositions prises n’ont pas touché de la même façon les différents groupes sociaux et les secteurs d’activité. L’augmentation du nombre de malades a parfois permis de prendre conscience collectivement de l’importance des activités de care, pouvant être définies comme des tâches variées, liées à l’entretien des corps, au maintien de l’autonomie (Ibos et al., 2019 ; Ledoux et al., 2023) et, dans un sens très large, comme une « activité générique qui comprend tout ce que nous faisons pour maintenir, perpétrer et réparer notre “monde”, de sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible » (Tronto, 2009, p. 143). Divers travaux en sciences sociales ont en particulier souligné la transformation des activités de soin à autrui induites par la crise sanitaire et le rôle de celles et de ceux qui ont permis de maintenir la vie pendant cette période particulière (Bahn et al., 2020 ; Chatzidakis et al., 2020 ; Rubery et Tavora, 2020 ; Eurofound 2022).
Si les personnels de santé ont été applaudis dans nombre de pays, dans certains cas, les personnes travaillant dans le care ont également fait l’objet de l’attention du public, des médias, voire des gouvernements. Cependant, tous les segments des métiers du care n’ont pas été systématiquement considérés et traités de la même façon. Les travailleurs du care, en particulier à domicile, sont en très grande majorité des femmes et des pauvres (Avril et Cartier, 2014 ; Devetter et al., 2017 ; Pulignano, 2019 ; OECD, 2020 ; Eurofound, 2022 ; Eige, 2021). Parmi elles, les femmes issues de l’immigration ou membres de minorités ethnoraciales sont surreprésentées, en particulier dans les grandes métropoles (Kofman et al., 2000 ; Salazar et Parreñas, 2001 ; Falquet et al., 2010 ; Lutz, 2011 ; Marchetti, 2014 ; Avril, 2014). Leurs conditions de vie, de travail et d’emploi sont très différentes selon leur situation familiale, le cadre d’activité – en institution ou à domicile –, les bassins d’emploi et les pays concernés (Avril, 2014 ; Van Hooren et al., 2019). À domicile, les statuts diffèrent : emploi déclaré ou non déclaré ; emploi par les particuliers, par un prestataire ou autoentreprenariat ; prestataires publics, associatifs ou commerciaux ; live-in work (habitant chez la personne aidée) ou travail ponctuel (Ramos Martin et Belen Munoz Ruiz, 2020). Ces différents statuts peuvent également donner lieu à des formes de ségrégation selon les caractéristiques sociales et les capacités à se mobiliser des travailleuses et de leurs employeurs ou bénéficiaires, qui sont variables d’un segment professionnel à l’autre (Van Hooren, 2021 ; Apitzsch et Shire, 2021).
Avec la pandémie de Covid-19, les questions que se sont posés les divers actrices et acteurs concernés ont été les mêmes : comment assurer la protection de la santé des travailleuses du care et des personnes dont elles s’occupent ? (…)
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Perspectives comparées sur l'emploi et les services de care à domicile en temps de pandémie
Revue des politiques sociales et familiales
vol. 150, no. 1, 2024, pp. 3-151
Date de parution: Mis en ligne sur Cairn.info le 26/03/2024
https://www.cairn.info/revue-des-politiques-sociales-et-familiales-2024-1.htm
Mis à jour le 18 avril 2024.